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Horizons et oraison d'un lecteur
11 juillet 2015

Le Comte Nicolas de Zinzendorf et le réveil de la foi

Ce genre de vie donne une idée de ce que peut faire une âme qui s'est vraiment consacrée au Seigneur et est "née deux fois" même si elle n'est peut-être pas "sainte" (mais qui peut juger ?) comme le montre l'histoire tumultueuse de la communauté de "Herrnhut" qui attirait quelques illuminés à tendance sectaire mais aussi source de réveil spirituel avéré. La "doctrine" de Zinzendorf est "mystique" (cf. "la doctrine ésotérique de Zinzendorf" de Pierre Deghaye qu'on ne trouve qu'à la B.N) mais son action est publique et sociale avant tout. 

Nous sommes extérieurement aux antipodes d'une Marthe Robin avec ce comte qui marche à pied et se déplace aux qutre coins du monde, mais nous trouvons le même désir de former des "maisons de Dieu" (synonymes dans un autre contexte de "foyers de charité" dans lequel les hommes libres peuvent vivre leur foi et leur dévotion) et de maintenir un cap inébranlable malgré tous les obstacles et les vissicitudes de l'existence. 

Zinzendorf  1700-1760 ( source : A. KNAPP, 1845 )

"Le Comte Nicolas de Zinzendorf était une personnalité exceptionnelle.

Regardez cette gravure de son  visage. Même si la gravure n’atteint pas la fidélité de la photo, elle respire la noblesse, l’intelligence, la bonté, une volonté ferme mais sans entêtement, une génialité dans le front qui frise au moins parfois la démesure, bref, elle rend bien le caractère de notre homme.

Nicolas de Zinzendorf est né en 1700 à Dresde. Son père faisait partie de la noblesse et exerçait des fonctions ministérielles en Saxe électorale. Parmi les témoins du baptême figurait, cela est significatif Philippe Jacob Spener, le fondateur du piétisme allemand, de ce mouvement qui voulait revivifier par une foi plus personnelle, nous dirions aujourd’hui plus engagée, la dogmatique luthérienne de l’époque.

Très jeune une veine spirituelle puissante se manifesta en lui, Nicolas aimait dans ses jeux d’enfants prêcher aux chaises vides ; lorsque les soldats du roi de Suède Charles XII pénétrèrent en Saxe et dans le château de son enfance ils y trouvèrent le jeune garçon agenouillé et abîmé dans les prières.

Cet aspect toucha tellement nos soldats qu’ils s’en retournèrent sans piller quoi que ce soit.

images

On pourrait dire que ce sont là des légendes. En tout cas ce qui est sûr, c’est que toute sa vie allait être marquée par cette ferveur religieuse exceptionnelle pour un jeune noble de son temps, exceptionnelle aussi pour l’époque bien que celle-ci ait été il faut le reconnaître plus naturelle dans ses rapports avec Dieu que la nôtre.

 Après ses études de droit à Wittenberg et à Halle , études qui, il faut le rappeler, étaient aussi toujours mêlées à de la théologie il devint conseiller juridique à Dresde. Et c’est là que peu de temps après son mariage à une fille de noble famille mais tout aussi dévouée que lui qu’eut lieu la rencontre qui allait décider de sa vie.

Un jour arrivèrent sur ses domaines des membres d’une petite communauté morave remontant à Jan Hus et qui avait été chassée de ses territoires par les souverains autrichiens.

Zinzendorf reçut généreusement les exilés comme des envoyés de Dieu, les installa sur ses terres et leur permit  d’y construire un village que l’on baptisa de ce nom mondialement connu depuis, de Herrnhut « Protection du Seigneur ». Ce qui est remarquable c’est qu’avec les exilés, de pauvres hommes sans titre ni culture ni bien, Zinzendorf fonda une communauté « Bruder Unität » celle dont il rêvait depuis longtemps ; et qui à notre époque de soif et de recherche de nouvelles formes de vie communautaire n’est pas sans intérêt.

Chaque matin et chaque soir on se retrouvait pour un culte, on divisait toute la communauté en petites

Sociétés ou «bandes» qui ouvertement s’exhortaient et se corrigeaient réciproquement, on se retrouvait pour des vigiles nocturnes de prière auxquelles participaient tous les hommes de 16 à 80 ans. Toute la communauté était dirigée par un conseil de 12 hommes, à la tête se trouvait Zinzendorf et un adjoint.

Pour couronner toutes ces institutions on célébra une grande Sainte-Cène dont la chaleur et l’intensité resta gravée dans tous les esprits. Un témoin raconte qu’après ce grand effort fondateur, ils restèrent plusieurs jours dans un état d’esprit de joie silencieuse. « Nous apprenions véritablement à aimer »

Il faut ajouter aussi que Zinzendorf était lui-même poète et que tout son entourage était comme gagné par cette fièvre poétique : Tout ce qu’on ressentait, tout ce qu’on vivait était mis en vers et en musique.

Dans nos recueils de cantiques soit allemand soit français il nous est resté un nombre appréciable de fruits de cet enthousiasme religieux qui mettait toujours au centre la foi, le Christ et son sacrifice sur la croix, le don de son sang pour nous et notre réponse humaine qui devait être souvent une vraie déclaration d’amour.

Tous les événements de la communauté de » Herrenhut, l’arrivée de nouveaux  exilés moraves, la mort d’un enfant, (Zinzendorf en avait 12 et 9  son décédés en bas âge,) la correspondance avec la famille princière du Danemark, vie de tous les jours et expérience du Seigneur, étaient mêlés inextricablement dans cette ferveur à la fois mystique et artistique.

Zinzendorf sentit bientôt que cette foi qu’il vivait si chaleureusement dans la communauté de Herrenhut il fallait aussi la communiquer à un monde souvent déchiré par des querelles dogmatiques stériles ou déjà rongé par l’incroyance moqueuse et hautaine de la fin de ce siècle ou tout simplement indifférente au sort des populations du nouveau monde.

Alors il se mit à voyager dans toute l’Europe, la plupart du temps à pied : lui le noble habitué aux carosses préférait le mode de locomotion des apôtres, les jambes. Il devint un pèlerin : « notre patrie disait-il est là où il y a quelque chose de concret à faire pour notre Seigneur ».

Oui, il devint un pèlerin à travers toute l’Europe, en Suisse, en Hollande, en Angleterre, et puis à nouveau en Prusse auprès du roi Frédéric-Guillaume Ier, puis à nouveau en Lettonie, (l’entrée de la Russie lui fut malheureusement interdite), toujours à pied, laissant après son passage, comme un apôtre toujours quelques communautés désireuses de vivre une vie de prière et d’amour aussi intense qu’à Herrenhut.

Enfin après avoir envoyé auparavant déjà bien des missionnaires en Afrique du Sud, au Labrador (actuellement Canada) et en Amérique centrale à la fois auprès des esclaves noirs et auprès des indiens autochtones et auprès des immigrants européens, il se rendit lui-même en Amérique  affermir l’œuvre de ces pionniers dont beaucoup avaient déjà succombé aux affres d’un climat inhabituel.

Pour éviter toute contestation avec les autres églises il fit ratifier son entreprise missionnaire par les autorités luthériennes de Berlin en leur demandant pour lui, théologien amateur, ainsi que pour deux de ses fidèles compagnons sans formation universitaire aucune, la consécration d’évêque. Et ce qui est tout aussi étonnant c’est que cette consécration leur fut accordée !

Zinzendorf était donc évêque, mais non pas emmuré dans le faste habituel de cette époque, mais itinérant et missionnaire se dépouillant à mesure qu’il avançait en âge de tout ce qui le liait à son ancien état de noble.

Benjamin Franklin avait assisté à Philadelphia à un fameux discours de notre comte où celui-ci déposa solennellement et librement son titre de comte. Après la mort de sa première épouse il se maria pour les quelques années  qui lui restaient à vivre à une des « sœurs » de Herrenhut, ancienne ouvrière dans le tissage.

Ces gestes ne manquaient pas de frapper l’élite cultivée de son temps et si après la période de mépris général que l’on avait pour la religion, mépris qui explosa d’une façon haineuse lors de la révolution, beaucoup d’esprits distingués se reprirent pour donner une nouvelle impulsion à la vie chrétienne, cela est en partie dû à l’action d’hommes tels que Zinzendorf, le comte fou, comme on l’appelait parfois, oui le comte fou de Dieu.

Zinzendorf mourut le 9 mai 1760 entouré par la prière de toute la communauté des frères moraves.

Il était au sein du protestantisme le premier homme à avoir assumé concrètement la vocation missionnaire auprès des païens. En un siècle déchiré par des querelles confessionnelles il mettait toujours l’accent sur le centre de la foi et avait à cœur de vivre cela avec des chrétiens de tout bord  théologique. Très attaché néanmoins à son luthéranisme d’origine, sa piété s’enracinait dans la Sainte Cène et le sacrifice unique du Christ.

 Piétiste, il n’avait pourtant jamais connu l’expérience de la de la conversion si chère à certains.

Noble, il le resta dans ses manières et son abord des gens mais il refusa néanmoins son titre et avec lui toute la noblesse d’étiquette :

 En Christ il n’y a plus ni Grec ni Juif ni Classe ni race ! 

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